Histoires de Migrants : Le Parcours d’Augustine
De nombreux jeunes migrants d’Afrique de l’Ouest traversent chaque année le Sahara à la recherche de meilleures conditions de vie à l’étranger. La plupart de ces périples n’aboutissent pas souvent, car les migrants tombent dans le piège des fausses promesses, de la violence et des dangers le long des routes migratoires. Certains rentrent chez eux et racontent leurs histoires en espérant que d’autres migrants potentiels — hommes et femmes — en tireront des leçons.
Voici l’histoire d’Augustine.
Augustine Blessing Eguvwese est né à Lagos au Nigeria. Il est l’ainé d’une famille de cinq enfants, et a obtenu son diplôme en communication de masse à l’Université de Lagos avant de devenir animateur de radio dans plusieurs stations locales de la capitale.
La crise économique qui a touché le pays en 2015 a plongé des milliers de Nigérians dans le chômage. Augustine en a été victime. Un an plus tard à l’âge de 26 ans, il décide de partir en Europe.
Avec le peu d’argent qu’il avait, il a embarqué dans un bus pour Agadez en direction de l’Algérie.
« Je voulais juste améliorer mes conditions de vie, trouver quelque chose de mieux. Je voulais également gagner assez d’argent pour démarrer ma carrière en radio… J’ai commencé à enseigner l’anglais en Algérie ; j’ai aussi fait d’autres emplois, malheureusement, je n’ai pas pu subvenir à mes besoins ni ceux de ma famille ».
Pendant les trois mois qu’il a passé en Algérie, Augustine a été le témoin directe de la discrimination dont sont victimes les migrants. Désemparé, il décide de rentrer au pays.
Son expérience avec les passeurs, raconte-t-il, était la pire partie du voyage — partager l’arrière d’un pick-up avec 30 autres migrants, et se retrouver bloqué dans le désert dans des températures accablantes.
« Pour rentrer, nous avons marché dans le désert des jours durant… Nous étions 14 ; certains sont tombés malades et ne pouvaient plus marcher, car ils étaient trop faibles. Nous avons essayé d’éviter le soleil, mais il n’y a pas d’abri dans le désert pour échapper à la chaleur. Nous n’avions pas de nourriture, et notre premier repas, nous l’avons pris au centre de transit de l’OIM à notre arrivée à Arlit avant d’être transférés à Agadez ».
« J’ai eu l’idée de lancer une station radio sur Internet durant mon voyage. J’ai rencontré 5,000 personnes au centre de transit de l’OIM à Agadez, des gens venant de partout, d’autres qui ont été kidnappés, électrocutés et forcés à se prostituer, certains dont les frères et les proches ont été tués devant eux… ».
Au Niger, il s’est inscrit au cours d’entrepreneuriat que l’OIM propose aux migrants dans le centre de transit. Lorsqu’il a terminé, il était impatient de retrouver sa mère, qui n’avait plus de ses nouvelles depuis son départ.
D’après Augustine, beaucoup de migrants ne sont pas conscients des dangers qui les attendent lorsqu’ils entreprennent la migration irrégulière. C’est ainsi qu’à son retour, il a eu l’initiative de s’appuyer sur sa propre expérience pour sensibiliser les Nigérians de ces dangers.
« En tant que journaliste, j’ai décidé de lancer une campagne de sensibilisation sur les dangers de la migration irrégulière à mon retour au pays. Je vais me servir des médias sociaux et tous les outils disponibles en lignes ».
Ainsi est nées Amebo FM, la « première station radio en ligne du Nigeria ». Elle a pour objectif de sensibiliser les personnes et les communautés tant dans le pays qu’à l’étranger, sur les dangers de la migration irrégulière et les alternatives de migration plus sûres.
Augustine et son équipe s’activent pour identifier les principaux facteurs de la migration, notamment le chômage. Cela a conduit à l’élaboration de formation pour la création de petites entreprises.
Il veut encourager les jeunes à s’informer davantage avant de décider d’aller en Europe. À quoi fait face un migrant ? Peut-on rejoindre l’Europe de manière régulière ou irrégulière ? Il les oriente également vers des organisations qui offrent des informations fiables sur les opportunités à l’étranger.
Il utilise d’autres plates-formes pour partager son expérience. Lors de la 108e session du Conseil de L’OIM à Genève, il s’est adressé aux représentants de gouvernements à l’occasion d’un panel intitulé « Voix de Migrants » (Migrant Voices) aux côtés d’une autre migrante Fabiola das Neves Sfalcini rentrée du Brésil.
Augustine a eu l’occasion de relancer sa carrière au moment où il s’y attendait le moins… Cependant, en tant que diplômé, il est conscient et également convaincu que l’éducation est un outil puissant pour aider les gens à faire de bons choix.
« Je pense que l’éducation est un outil puissant. Il aide les gens à faire les bons choix. Si vous n’éduquez pas votre peuple, vous ne pourrez jamais développer votre pays. C’est pourquoi les gens partent ».
Cette histoire a été publiée en Décembre 2017 par Jorge Galindo, responsable de l’information de l’OIM à Genève. Pour en savoir plus sur le programme de l’aide au retour volontaire et à la réintégration (AVRR) de l’OIM, cliquez ici.