“CinemaArena” : Sensibiliser les communautés sur les risques de la migration irrégulière à travers le cinéma itinérant

OIM - ONU Migration
6 min readAug 9, 2021
Arrivée et mise en place du camion de projection à Mbour Tefess. Photo: IOM/Lygali Grâce Marvel Fleurdin DISU

Le 14 Juin 2021, a débuté au Sénégal, la Caravane de sensibilisation CinemArena qui est allée à la rencontre de communautés urbaines et rurales vivant dans 11 localités reculées de Mbour, Fatick, Thiès et Saint-Louis, avec comme principal objectif de sensibiliser sur la migration irrégulière.

Financé par le Ministère Italien des Affaires Etrangères avec le soutien de l’Agence Italienne pour la Coopération au Développement, CinemArena est un projet de ‘cinéma itinérant’ mis en œuvre par l’OIM dans les zones urbaines et rurales en Afrique de l’Ouest.

Pendant plus de 3 semaines, la caravane a sillonné le Sud, le Centre et le Nord du Sénégal allant de Mbour Tefess, Pointe Sarène, Samba Dia, Toubacouta, Foundiougne, Joal, Diender, Bayakh, Guet Ndar, Rosso Sénégal à Sébikotane, pour organiser un éventail d’événements en plein air tels que des projections de vidéos accompagnées d’animations, de discussions et témoignages qui ont permis de toucher environ 12 000 femmes et hommes âgés de 7 à 60 ans.

« Tant que les gens sont informés, ils peuvent avoir beaucoup plus de visibilité, ils peuvent avoir beaucoup plus d’appréciation dans ce qu’ils prennent comme initiative mais quand les gens ignorent ce qui se passe sur la route, c’est la porte ouverte à toutes les dérives. » a déclaré Mbagnick Ngom, facilitateur OIM lors de la cérémonie de lancement de la caravane CinemArena.

La plupart des jeunes rencontrés dans ces localités rurales affirment ne pas voir de perspectives d’avenir professionnel sur place et ne voient qu’une issue à leur situation : la migration. Disposant de peu d’informations sur les procédures de migration et se faisant beaucoup d’illusions, ils quittent leurs villages et empruntent la voie irrégulière en ignorant les risques encourus.

La caravane CinemArena a été initiée pour informer et éduquer sur les questions de migration irrégulière et de trafic des êtres humains tout en engageant et en responsabilisant les communautés locales, les migrants de retour et les migrants potentiels par leur participation active à cette initiative mise en œuvre au Sénégal depuis 2018.

« …les coins de départ, ce sont les zones rurales…beaucoup de jeunes n’ont pas accès à internet, il faut penser à aller vers eux… » ajoute Mbagnick Ngom. Cette caravane permet à l’OIM d’aller à la rencontre des populations pour leur faciliter l’accès à l’information à travers différentes activités et leur offre la possibilité de discuter et de poser des questions sur la migration.

La population de Mbour Tefess qui participe à une séance de projection. Photo: OIM/Lygali Grâce Marvel Fleurdin DISU

La caravane contribue également à déconstruire les illusions de réussite en Occident que certains de ces jeunes peuvent avoir reçu. « Ce qui a accentué ce phénomène, c’est qu’il y a eu des départs en 2006–2007 et donc ces gens-là vivant à l’extérieur viennent en vacances et se pavanent mais ils ne parlent jamais de ce qu’ils ont enduré » explique Ndoura Diouf, un agent de la mairie de Foundiougne, à Fatick.

Pour garantir la réussite de la caravane, CinemArena s’est entouré de facilitateurs, de migrants de retour habitant dans ces localités de même que des artistes locaux pour mobiliser les communautés et leur permettre de s’identifier à ces activités. « Il y a des artistes au niveau local avec qui nous discutons parce que nous souhaitons que les gens se l’approprient… nous faisons appel à des rappeurs, nous faisons même appel à des artistes locaux traditionnels dans le but de motiver la population à s’approprier ces activités, les solutions ne peuvent découler que d’eux…le pourquoi nous faisons appel également à des migrants de retour de la localité… si l’un d’eux prend la parole, il peut être reconnu par quelqu’un dans la foule qui se dira : j’ignorais tout ce qu’il avait réellement enduré. » explique Khady Ngom, point focal du projet CinemArena à l’OIM Sénégal, sur la radio communautaire de Foundiougne à Fatick.

Prestation de chants traditionnels à Pointe Sarène. Photo : OIM/Lygali Grâce Marvel Fleurdin DISU

Le défi majeur durant cette caravane était de pouvoir mobiliser une grande foule et de s’adapter à leur mode de vie pour leur proposer des activités ludiques à forte résonnance. Ces activités sensibilisantes ont été multiples : visites d’écoles avec des quiz proposés aux élèves, débats radiophoniques, concours de danse, prestations théâtrales et artistiques, projections accompagnées de discussions et témoignages qui ont permis de toucher des centaines de personnes.

Des jeunes femmes de Diender habillées en tenues traditionnelles. Photo: OIM/Marianne Anna DIOH

S’inspirant des précédentes tournées d’écoles déjà initiées à Dakar, la caravane en a fait de même dans toutes les localités où elle est passée organisant 7 tournées pour rencontrer les plus jeunes et les sensibiliser à travers des projections, des sessions de questions-réponses et des discussions. Ces moments ont été riches en émotions pour la plupart de ces élèves qui ont eux-mêmes perdu un proche parti par la voie irrégulière.

Des élèves du lycée Malick Sy de Thiès s’affrontent sur le quiz CinemArena. Photo : OIM/Marianne Anna DIOH

Outre son caractère sensibilisant et informatif, la caravane CinemArena est l’occasion de proposer aux jeunes des alternatives de réussite à travers des partenariats avec des structures locales pour leur proposer des opportunités de réussite et de renforcement de leurs capacités.

« …ce qui m’a le plus marqué c’est l’accueil qu’en général les autorités locales et les populations ont de cette initiative, dès que vous arrivez dans une localité et vous expliquez un peu aux gens le projet, vous sentez déjà qu’il y a un soulagement… » ajoute Mbagnick Ngom. Durant la mise en œuvre des activités CinemArena, seul l’instant présent ne compte pas mais les agents sur le terrain travaillent sur la durabilité des messages de sensibilisation et favorisent de même l’émergence de relais communautaires qui se chargeront de continuer à véhiculer les informations même après la fin de la caravane. Ainsi, tout au long des quatre semaines, l’OIM a aussi visité les autorités administratives et traditionnelles.

« La partie où on arrive au village, on prend contact, on organise c’est là vraiment où on va créer des potentielles synergies. Le contact reste, la caravane passe et l’importance est de laisser quelque chose… », a déclaré Mme Alessandra Piermattei, Directrice de la Coopération Italienne au Sénégal lors de la cérémonie de lancement de la caravane.

L’accès à l’information peut être difficile pour ces populations vivant en zones rurales, en particulier pour les potentiels migrants, CinemArena compte sur ces personnes pour partager les informations reçues avec le reste de leur communauté par le biais de l’organisation future d’événements similaires ou de groupes de discussions

Cette perspective a été également partagé par Ndoura Diouf, agent de la mairie de Foundiougne sur les ondes de la radio communautaire : « au niveau de la Mairie, nous pourrons peut-être utiliser ce qui en découle, le conceptualiser et le mettre en œuvre à fin d’utilité publique… ».

Cet article a été écrit par Marianne Dioh du Bureau régional de l’OIM à Dakar.

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